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Cherry Ford

Cherry Ford


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MessageSujet: » cherry pop × gigi « » cherry pop × gigi « Icon_minitimeMer 28 Mar - 23:42


Lina m'a dit « Pour qu’une histoire finisse bien, il faut qu’elle ne finisse pas. » et quand je l'ai répété, Ashley m'a répondu « Et les Disney, alors ? » C’est vrai, ça. Et les Disney ? Alors.


La robe de Sofia est étendue sur mon lit, aussi parfaite et époustouflante que sa propriétaire ; elle raconte une histoire que je ne suis pas sûre de saisir mais qui me laisse immanquablement sous le charme, aussi impressionnée qu’effrayée. Elle invoque en moi, l’inventant presque de toutes pièces, un courage millénaire, envié aux valkyries ailées. J’ignore encore si j’aurai le cran de la mettre mais ressens la certitude que l’envie de le faire l’emportera sur mes plus craintives résonances. La voix de Gigi, chantant à tue-tête depuis la pièce attenante, me libère de mes doutes incessants. Je l'accompagne sans y penser, reprenant sous mon souffle ce refrain fait pour deux quand mon téléphone, couché tout à côté de l’objet de mes tourments, accueille un message. Je rifougne, lisant de lui : « Alors elle vient, cette robe de déesse ? » et fouille un instant dans mon catalogue de références littéraires avant de lui répondre « Keep calm, Luigi. » et de le rejoindre, affairé dans ma cuisine.

Je lui avais promis de revenir en portant, fière et métamorphosée,  ma chamboulante tenue de soirée. Mais voilà qu’il se retrouve face au même assortiment dégueulasse qui l’avait accueilli plus tôt, composé de mon t-shirt préféré parce qu’ultra confortable et à ce point magique que cent lavages n’ont pas encore effacé le parfum de Sam, me l’ayant généreusement donné contre son gré, et d’un short en coton que j’avais déniché lors d’une énième sortie avec Ashley où nous n’avions, à nouveau, pas été capables d’acheter ensemble quoi que ce soit d’autre qu’un pyjama chacune. Mais Gigi semble prendre mon dégonflement avec clémence, c’est à peine s’il lève les yeux au ciel. « Est-ce que je te dégoute ? » je lui demande. Il soupire et je le trouve sublime. Il ne me parait rarement aussi viril que lorsqu’il cuisine à ma place pour un homme que j’aime, et que j’ai, mais que je continue d’essayer de séduire quand même. Il me parait tout à fait injuste que, sans fournir le moindre effort, Gigi ressemble à ce que j’ai en face de moi : le fils élégant d’un gangster et son exotique conquête, tandis que j’ai probablement l’air d’être passée au car wash toutes fenêtres ouvertes, violentée par des rouleaux en caoutchouc. Il va en dégobiller dans les lasagnes. « … Non. » il finit par concéder pour me faire plaisir. Je ne sais pas pourquoi mais je le prends pour un défi alors je m’affaisse, relâchant tous mes muscles et recroquevillant mes mains pour me trouver être, debout, la version fidèle d’un vieillard assis. « Et là ? » J’entends son rire, profond à trouver un écho jusque dans ma poitrine, et peut-être était-ce la réaction que j’attendais puisque je me sens toute disposée à passer à autre chose, nouant mes cheveux dans un volumineux chignon bordélique qui me vaudrait une malédiction sincère et violente de la part de Shane. Sur quatorze générations et-demie, incluant la mort par scorbut d’un lointain cousin qui n’a rien demandé à personne. Si je ne le rebute pas, peut-être que je devrais me montrer ainsi à Wade. Sans artifice, sans préparation ni papier cadeau, rien que moi telle qu’on me découvre avec horreur au réveil. Ce serait fait. J’en souris, gloussant en m’agitant bêtement lorsque je ressens, immédiate et puissante, la certitude qu’il me garderait quand même. Je me languis, geignant un peu, de retrouver son visage et ses yeux doux, les plus expressifs du monde. J’ai l’urgence de poser mes mains sur les siennes, parfaites, qui ont frôlé tant de fois l’horreur qu’elles n’ont rien à envier aux phalanges d’une brute. Il me tarde d’embrasser l’endroit de sa lèvre où sa barbe sature sa douceur d’un brin de piment qui, la contrastant, complimente son infinie tendresse. « T’as pas de soucis à te faire. » s’interpose Gigi dans un haussement de sourcil, « N'importe qui te trouverait belle. » Ooh. Je ne suis pas certaine de comprendre, mais ooh quand même. Je le prends comme il me plait et il me plait d’entendre que, puisqu’il est au-dessus de n'importe qui, je suis sûre de ne pas effrayer mon Wade.

« Est-ce qu’il t’a déjà vue pleurer ? » me demande mon meilleur ami lorsque je m’attable en cuisinant à ma façon, c’est-à-dire en le laissant faire à ma place. Je repense à notre rencontre et à la détresse que mon Docteur préféré a encaissée, me laissant lui dire merci sous les larmes et un tout premier baiser. « Oui, direct. » je fais un geste de la main comme si j’assénais un taquet à quelqu’un, l’air de dire "boum, pleine gueule". Gigi, à qui le petit pull gris donne le teint doré d’un dieu, dit, soulagé : « Tant mieux. » et je m’offusque, lui prenant une pâte crue pour la mordre, regretter tout de suite et, la recrachant lui dire : « Pourquoi tu le dis comme ça ? Est-ce que je suis horrible, quand je pleure ? » Laide ? Difforme ? Liquide ? Bon dieu ne me dis pas ça maintenant. « Non, mais tu es… » il prend une longue inspiration, l’air de se préparer à prendre un coup et me regarde dans les yeux lorsqu’il me perturbe en me mettant, lui, un gnon : « …pénible. ». Je ne crois pas. « Comment ça ? » Il fait erreur. « Chiante. » Ah ouais ? « Chiante ? » Dis donc. « Casse-couilles. » Bon… « J’ai compris. » Mais ça n’a pas l’air de suffire. « Une pu-tain d’emmerdeuse. » Oh. « Oui bah ça va maintenant. » Il rit et le charme du moment, souligné par la musique me donnant le sentiment d’être au cœur d’un film, exacerbe ma tendresse qui l’emporte sur les poussières que forment péniblement incertitude et rancœur. Quand il me tend la cuillère en bois rougit par la sauce juteuse, j’y vois un calumet de la paix, fumant un pacte que nul ne saurait rompre jamais. Je craque lorsqu’il retire son bras alors que j’allais goûter pour pouvoir y porter ses lèvres le premier et souffler sur l’ustensile, évitant que je m’y brûle. « Ne le répète pas mais je préfère tes lasagnes à celles de ta mère. » je l’ai dit à voix basse, comme si je craignais qu’elle ne se cache dans l’un de mes placards. Gigi plisse le front, l’air très Olliesque de me prendre pour une con, à un "Mais !" près de me demander si je suis devenue intolérante au lactose ou quelque chose dans le genre. « Ce sont exactement les mêmes. » Il me donne la cuillère pour appuyer l’argument et j’accueille sa cuisine comme une ostie salvatrice sur ma langue, l’assurance, puisque je les entrevois, de franchir un jour les portes du paradis.  « Non. » Je confirme. «  Il y a quelque chose de différent. » Je ne saurais pas dire quoi, ne pourrait ni le pointer de la langue, du nez ou du doigt mais il y a quelque chose en plus, lorsqu'il s'en occupe. De plus pur, je dirais. D’infiniment parfait qui teinte le moindre arôme d’un secret gardé même des anges, précieux à n’être connu que d’une âme, peut-être deux. Gigi regarde les ingrédients éparpillés entre nous, traçant la route de ses gestes, revivant le voyage nous menant jusqu’ici et l’absence de doute lui donnant un aplomb trop protecteur pour être agaçant. « Je t’assure que non. » Oh mais. Il va céder, oui ? « Et je te dis que si, nom d’une Lady Crawley. » Il soupire, j’ai gagné. « D’accord. » Voilà. « Merci. » il pose les armes, je souris. « Voilà. » C’est quand même mieux comme ça.

Mon Gigi sourit en retour, ses dents blanches contrastant avec le hâle naturel de sa peau dorée mais c’est quand il serre sa mâchoire à en faire bander les muscles, que je comprends. Il a raison, j’ai activé mon mode pénible à l’instant. Quelle horreur. Ça pète n’importe quand cette machine, ce que c’est mal foutu. J’ai dû être fabriquée en Chine. « Je suis chiante comment ? » Quand je pleure, je lui fais le signe. Pas maintenant, quoi. Là, j’en ai tiré du plaisir, c’est un tout autre crime. Il s’assoit en face de moi après avoir mis les plats au four, le pauvre n’en a pas assez à subir ma chiantise, voilà qu’il doit l’autopsier pour m’en faire l’éducation. Je ne suis soudainement et dans l’effroi pas certaine de les mériter, lui et son infinie patience. Je nous sers un verre, l’air de faire une offrande pour attirer les faveurs d’une toute puissance. Il boit, songeur, et je devine qu’il cherche le mot juste. Chiante comment, exactement ? Il me regarde comme si j’étais un feu proche de l’explosion. Puis il assène, prudemment : « Injuste, tu reproches… un tas de trucs à ceux qui n’ont rien demandé. » Ça ne me ressemble pas. « Tu dois confondre avec quelqu’un d’autre. » Il s’amuse, le prend pour un défi. « Gigi, je rêve ou tu soupires ? Gigi, pourquoi t’as souri ? Gigi,  pourquoi tu vas pas te battre avec ce type ? » Ça ne me dit rien, il doit avoir une masse d’autres amies. « Je crois que tu penses à une autre fille. » Ça devait être Sixtine. « Gigi, pourquoi tu m’as pas dit que j’étais belle, t’as qu’à le dire si tu me détestes. » Ah. Mais même. « Je suis sûre que c’est une histoire de contexte. » Gigi approuve, opinant du chef. « C’est toujours le même : tu bois. Tu bois, ça te rend triste et t’actives ton mode pénible. » Ça m’émeut qu’il ait reprit mon expression comme si elle était connue de tout le monde. Ce qui m’émoustille moins, c’est de prendre conscience de cet horrible défaut si habituel qu’il tient déjà plus du mode opératoire. Je suis une délinquante, la briseuse de couilles des boulevards. Cachez vos femmes, cachez vos enfants. « Faut que j’arrête de boire ? » Ça parait raisonnable, à un tel degré d’épouvante, non ? Gigi hausse les épaules. « Ou d’être chiante, mais ça fait partie de ton charme. » Il boit, nonchalant, et je glousse de mon tendre rire de pintade.

Parfois, Gigi ponctue ses gestes d’un quelque chose nouveau, une indescriptible innovation semblable aux rêveries d’une machine. Il est fait de tant d’envoutantes et délicates nuances que j’ai le sentiment de remarquer des détails sur un tableau centenaire qui aurait pourtant recouvert un mur de ma chambre d’enfant. J’ai beau l’avoir vu des milliers de fois, chaque regard langoureux sur lui me fascine au point de semer le doute : est-ce réellement nouveau ou est-ce moi qui ne le découvre que maintenant ? J’envierais Sherly à qui jamais rien n’échappe si je n’étais pas si éprise de ces incessantes  révélations. Ses délicieuses minuscules expressions me font me demander si son visage est celui que je connais le mieux au monde, si je serais capable de le reproduire, fidèle, dans l’argile ou lui faire honneur sur une toile parfumée par l’huile. Mais encore faudrait-il que je sois capable de créer autre chose qu’une difforme patate. « Quoi ? » il finit par demander, cette même nouvelle lueur toujours sidérante au coin de l’œil. « Rien. » je minaude sous son soupir habitué à ce petit genre de frustration. S'il savait que lui dire ‘rien’ c’est lui épargner un laborieux et maladroit monologue qui ferait péniblement écho à ces pensées qui ne sont pas faites pour la lumière du jour. Lui dire ‘rien’ c’est lui rendre service, abréger la souffrance causée par un flot de paroles insécures, incertaines, un brin trop sérieuses. Lui dire ‘rien’ c’est préférer ne pas dire tout haut ces choses qui paraitraient alors folles et lui feraient comprendre que je suis tarée en plus d’être chiante et que je suis un phénomène dangereux ne méritant ni confiance ni médicament, direct au trou la dingo. Dire ‘rien’, même s’il l’ignore, c’est choisir de rester celle qu’il accepte, la Cherry à laquelle il adhère. Encore un peu.  Et c’est surtout me dire qu’il n’a pas intérêt à me faire la même chose sous peine d’être harcelé jusqu’à m’avouer inévitablement tout ce qu’il avait à l’esprit et me laisser savourer ces fragiles caprices hypocrites.

« Tu sais. » j’amorce pour revenir en terrain sûr. « J’avais pas bu quand Wade m’a vue pleurer. » je me remémore le souvenir de cette journée et me retrouve immanquablement sous la protection de mon ange, haut, tendre et puissant. J’ai, à même les sens, le reflet de mes sensations abritées par son ombre, secourues par une étreinte dont le seul souvenir est depuis devenu le refuge de toutes mes peines. L’arc qui dessine le front de Gigi se déforme, courbé par une compassion curieuse. « T’étais triste ? » J’y repense. Mais n’ai pas à en souffrir puisque Wade était là. Wade était là et tout s’est bien passé. J’aurais, autrement, dévalé la pente de ces terreurs avec une violence me renvoyant, là, dans une salle d’attente où je pleure encore Teddy. Tout s’est bien terminé, mieux que bien. Mieux que mieux. Wade était là. « Vulnérable. » je résume, songeant à mon état. Et, juste ici, une de ces indescriptibles émotions donne un nouveau relief à la mâchoire de Gigi sur laquelle errent mes yeux avant de retrouver les siens. « Quoi ? » je demande, ma voix basse trahie par une sensible appréhension. « T’as rien à craindre. », il sourit, « Il a dû tomber amoureux tout de suite. » Je soupire pour ne pas mourir. « Merci, Gigi. » Et ses mots magiques.
Le son d’un éclair déchirant le ciel me fait sursauter et je libère la main de Gigi que je n’ai pas le souvenir d’avoir été cherchée. Je remarque le son rassérénant de la pluie couchée sur mes carreaux et, retenant mon souffle, l’entends aussi caresser le trottoir de ma rue. Me savoir au cœur d’un orage réarrange immanquablement mes pensées, mes souvenirs et mes priorités pour me propulser toute entière dans un songe particulier. Toujours le même ; immortel, inchangé.

La dernière année de lycée touche à sa fin et tout change si vite que nos cœurs peinent à suivre le rythme. Les amitiés décennales seront bientôt soumises à la rude épreuve de la séparation et rien sur Terre ne paraissait alors plus bienvenu qu’un dernier voyage scolaire pour cimenter nos jeunesses dans le passage du temps. Nous sommes sur les rives printanières d’un lac où nous avons retrouvés nos correspondants québécois et tout, du dépaysement, à leurs accents, en passant par l’intolérable présence d’un professeur de français se trouvant être mon nouveau beau-père et que j’avais vu trop de fois à moitié nu pour continuer à alimenter toutes mes fonctions vitales simultanément, semble être mis en place pour achever nos hormones éclatées façon feu d’artifice.
Nous avons passé deux heures à éparpiller et monter nos tentes et tandis que chaque binôme rejoint la sienne pour la nuit, Bash me confie ne pas être rassuré à l’idée de dormir non loin de la prof d’anglais de nos copains de plume qui n’a cessé de faire allusion à son célibat pendant nos deux premiers jours de voyage. « She wants it. » il me dit tout bas, sa voix grave devenue un murmure de plus dans le tonnerre qui gronde. J’ai envie d’aller lui chercher un miroir de deux mètres quarante pour qu’il puisse voir ce que je vois. Ma langue tique contre mon palais. « Mais. » je serre les poings au niveau de ma tête et de ses épaules. « Comme tout le monde. » je fais le geste, désignant les tentes partout autour de nous. « Cadenasse ta tente. Serre-les dents. Non, serre tout ce que tu peux serrer. Et surtout : ne tourne le dos à personne. » c’est le point le plus important, lui signifie mon index. Il rit, si injustement lumineux qu’il risque de faire croire à tout le monde que ça y est, la nuit est déjà passée. « Si tu veux être tranquille, arrête de sourire. » je propose en plissant l’œil ébloui par son expression solaire. Il obéit, se concentre dans un râle et devient soudain si grave que j’en décanillerais. Quelque chose gronde et à ce point-là, je ne sais plus si ça vient de lui, de moi ou de l’orage qui débarque. « Okay laisse tomber. T’es cuit. » Je m’en vais, c’est ridicule. Il va passer les trois prochains jours à écarter tout le monde avec une badine, faire des grands gestes pour avoir un périmètre de sûreté de la portée de son bras. Soit environ deux mètres, il survivra. « Sois sage ! » il me lance en guise de bonsoir alors que j’ouvre la fermeture derrière laquelle m’attend Lina. Quand je me retourne, je constate qu’il n’a pas bougé et il hausse les épaules pour me faire comprendre que j’ai pas aidé mais qu’il m’aime bien quand même. « Hey, Teddy ?! » je hurle à travers tout le campement improvisé. « Ouais ?! » répond une voix lointaine, qui éclate comme le son d’un rocher coupé en deux. « Tu savais que Bash n’avait qu’une couille ? » je mords ma lèvre quand j’entends Lina rire derrière moi. Le silence soudain sur le camp me secoue d’un frisson. « Oh ! » intervient l'intéressé, les bras écartés. « Pardon. » je grimace. « Testicule. »  Je rifougne niaisement - pas que ça puisse être fait intelligemment - « Nooon ! » traine la voix incrédule de Teddy. Mon très beau-père fait ce geste de la main, celui de fermer ma gueule ou de me décapiter, au choix. Je lui offre mon plus grand sourire. Il ne risque plus rien maintenant. « Voilà, bonne nuit ! » Et vais vite m’enfermer auprès de ma meilleure amie qui, sitôt que je suis allongée, me demande « C’est vrai ? ». Je poufsouffle. C’est-à-dire que je pouffe et souffle en même temps avec toute l’absence de grâce propre à un membre de cette maison, en bonne délurée hystérique. Je suis surexcitée, mes neurones cautérisés par l’effervescence ambiante. Il y a dans l’air cette électricité charriée tant par les nuages que l’état contagieux d’une quarantaine d’étudiants bouillonnants et entassés sans grande supervision. « Non. » je soupire en roulant sur le dos. « Ce salaud est parfait. » Il commence à pleuvoir et, assez vite, monte l’odeur de l’herbe mouillée charriée par des vents qui s’affolent. « T’as pas froid ? » je demande à Lina tandis que je me déshabille et que mon pyjama me parait soudainement bien trop fin. « Jamais. » elle me sourit et me parait si belle alors que je me demande si elle vient bien de notre planète. Ça m’époustoufle, parfois, quand mon regard l’attrape et que, venu de nulle part surgit le rappel que l’on s’est choisies l’une l’autre si facilement que l’idée même de penser à ma vie avant elle m’étourdit de son vertigineux manque. Je n’imagine pas une seule journée sans avoir pu lui parler et il me semble que nous n’entretenons qu’une seule et grande conversation que nous avons entamée il y a trois ans. Elle est tout ce que je ne suis pas, assortie à tout ce qui fait d’elle le plus unique mélange de force et de féminité que j’ai jamais connu de si près. Lina Prince, l’appelle sa petite sœur, et rien ne semblerait mieux lui convenir. Sauf Lina Tuesday, il va sans dire. « Tu devrais être avec Teddy. » je lui souffle, allongée sur le côté, mes mains chacune calée dans l’une des siennes qui me réchauffent corps et âme. Elle « Mmh. » un quelque chose perdu entre le rire et l’acquiescement, l’air de ne pas trop me prendre au sérieux. « Non, vraiment. » je bondis, excitée, complétement séduite par l’immature opportunité de pouvoir faire une bêtise. Mon cœur tambourine déjà à l’idée de pouvoir réunir des amoureux ; je me sens, transie, m’improviser artisane de leur réunion. « Je suis très bien avec toi aussi. » elle me rassure en tirant sur mon bras pour que je reste en place. Je me relève immédiatement, comme montée sur ressors. « Mais il est juste là… » je désigne l’extérieur avec une théâtralité digne d’une miss météo. Même mon sourcil use de ses charmes. Une violente bourrasque creuse une boule contre le tissu de notre habitation en laissant derrière elle la fraicheur et le parfum du lac. J’adore ça. Tout a l’air soudainement si relatif, poétique, amusant. Comme si le temps lui-même allait oublier les événements du soir tant qu’un peu de bravoure le rendait possible. Je pourrais crier. Lina le sent, c’est pourquoi elle chuchote « Et où est-ce que tu vas dormir ? ». Je ris, en l’entendant céder à mon plan. « Avec Gigi. » je hausse les épaules, « Ça nous est déjà arrivés. » Lina s’assoit en tailleur en face de moi, une expression perplexe barrant son regard soudainement quasi maternel. « Pas depuis dix ans. » elle me rappelle. Et puis balaye mon corps entier d’un vague geste de la main. « Et pas avec… tout ça. » Pff. Je poufsouffle à nouveau. Alerte à la Serial Pouffeuse. Sortez le poison pour blaireau. Attends. « C’est Gigi. » je lui dis comme une évidence. Mon petit Gigi. Elle n’achète pas, mais qu’à cela ne tienne, ma décision est prise. « Je vais le chercher. » je lui annonce avant de planter un bisou sur sa main et d’ouvrir la fermeture de notre tente. Une rafale me heurte la gueule si sauvagement que j’en oublie toutes mes belles intentions ; l’intégralité de mes cheveux est passée sur un seul côté de ma tête et, un instant, j’ai peur qu’ils restent dans cette position pour le reste de la semaine. Mais je sors, pour mes amis. Et mes pieds nus rencontrent le sol spongieux qui accueille mon passage avec une symphonie de shplock en orteil majeur. J’essaie de me faire discrète malgré mon envie de rire à pleins poumons, complétement heureuse dans les éléments déchainés, émue sans l’expliquer d’avoir la sensation de ne faire qu’une avec la charge qui m’entoure et s’enroule tout autour de ma carcasse trempée dont les vêtements ne sont plus qu’une anecdote, un soupir contre le vent. À mi-chemin, je fais une pause pour contempler la vision de la montagne et son bassin et trouve le spectacle aussi époustouflant en plein jour qu’ici plongé dans la pénombre saturée par les rayons lumineux d’une pleine lune. « Wow. » je murmure pour moi sous l’œil de la tempête. J’ai envie de prolonger l’instant, seule avec la nature et j’écarte les bras sous les pluies diluviennes, me faisant l’humaine invitation des cieux afin que dans leur fureur ils descendent et nous présentent à leurs anges. Puis un éclair en réponse s’abat sur l’eau dans un bruit tonitruant qui me fait couiner dans la panique et je reprends ma course, désormais plus liquide que solide, vers la tente encore allumée des garçons. « Teddy ? » je murmure mais doute qu’il m’entende. « Gigi ? » j’essaie comme s’il pouvait sentir ma présence. Je regarde derrière moi, m’assurant de n’avoir alerté personne et m’engouffre chez eux sans plus de cérémonie. Je les surprends, tombant à genoux, imbibée à avoir l’air tout droit sortie du lac. « Oh ! Pu - » éclate Gigi, faisant de grands yeux en me découvrant, « Ouais ! » finit Teddy d’une même voix en se reculant pour me laisser de la place. « Oui, bon. » je sais. « Il pleut. » je leur donne comme excuse. « Sans déconner. » Gigi sourit tant qu’il peut. « Ah ah, elle est mouillée. » j’assène d’une voix balourde mais un brin vexée qui les fait éclater de rire. Celui de Teddy me percute à résonner dans ma propre poitrine. J’ai cette théorie que quiconque entend son rire tombe immédiatement pour lui tant il est irrésistible, sincère et communicatif. J’aimerais presque poser ma main sur son torse pour sentir sa peau vibrer comme un puissant caisson de basse. Je cherche l’inspiration pour leur en vouloir et bouder un peu mais je me prends à glousser malgré moi, changée par son rire pas comme les autres qui m’amuse et m’allège sans contexte, aussi protecteur et généreux que son maitre. Je les trouve magnifiques, mes inséparables, tandis qu’ils se marrent, l’un en tenant son ventre et l’autre en essuyant une larme. Bon peut-être pas si beaux que ça, quand je me souviens qu’ils sont en train de se moquer de moi. Ils sont même carrément pénibles. « Ça suffit. » je geins sans autorité en assénant une petite tape de femmelette à l’endroit où se touchent presque leurs deux épaules. Teddy éclate de son rire tonitruant quand ma main glisse niaisement sur eux. C’est à croire qu’il n’a pas conscience de la noblesse de mon sacrifice. « Allez casse-toi Teddy. » Ça le calme tout de suite. Il fait sa moue empruntée aux pétasses de la télé, à deux doigts de me dire « Gurl, whatchu just said ? » en jouant de l’index. N’importe quel autre soir, dans un autre état, j’aurais joué le jeu en dandinant de la tête mais ma dite tête tenant présentement moins de l’humain que du concept, je me contente de pivoter pour dégager le passage et lui apprendre qu’ « On échange nos places. ». Teddy craque un sourire en levant mains et sourcils vers Gigi puis moi et prend l’air très oulalaesque de se faire des histoires. « Je vois, je vois. » sort-il de nulle part. Quelque chose m’échappe, je sollicite Gigi du regard pour qu’il me soutienne mais il a l’air étrange d’être paumé devant la vitrine d’une boutique de lingerie dont les mannequins seraient dotées de mensurations surréalistes. Mi- gêné, mi-effrayé, mi-ouiouis’ilvousplait. Ventile-toi, mon ami. « Woh, une seconde. » je les calme en plissant les yeux. « On échange pour que tu puisses dormir avec Lina. » Un violent frisson me fait dire « brr » à voix haute quand je me tourne pour montrer l’endroit, à l’autre bout de la tempête, où se trouve notre tente. Je vais tellement être malade demain. Mais j’ai pas envie d’être malade demain. Gigi, fais quelque chose pour que je sois pas malade demain. Je remarque ses yeux qui m’évitent soigneusement et quand il me tend spontanément la couverture qu’a quittée Teddy je me demande s’il le fait pour me réchauffer ou préserver ma pudeur. « Ouais ouais. » tranche notre ourson géant, la voix égarée entre l’amusement et l’abandon. Il rampe comme il peut, à l’étroit dans l’habitacle qui peine à nous accueillir tous les trois et je le supplie silencieusement de ne pas se lever pour tendre le bordel et nous écraser mode pancakes. Je prends sa place à la chaleur oh si bienvenue et il me caresse le bras d’une main prévenante avant de sortir sous la pluie, protégé par une veste qui semble tout à coup avoir pu être une bonne idée. « Te fais pas foudroyer, Titty. » je lui suggère, pleine de sagesse. Il sourit, plié en deux et me promet un complice « Jamais. » avant de s’en aller.
La tempête perle à grandes gouttes des impacts mélodieux qui me donnent le sentiment d’être enfermée au cœur d’un tambour et, grondée par la violence de l’orage omniprésent, je me confonds avec ces frissons infiltrés jusque sous ma peau. J’ai froid. J’ai froid et l’euphorie redescendue me le rappelle à chaque seconde passée sous notre ruisselant tam-tam. Giuliano mon cher époux et potentiellement ma personne préférée au monde me surveille du coin de l’œil dans la lumière jaune de la petite torche accrochée au plafond. J’ai l’impression de pouvoir tout lui dire, ainsi cachée de l’orage, du monde et du temps. Je nous sens être les prisonniers d’une bulle fantôme dont le dôme nuageux ne protège que nous deux. J’inspecte son air concentré en tremblant. « À quoi tu penses ? » je lui demande en resserrant la couverture de Teddy autour de mes épaules. Gigi ne quitte pas ce masque figé, je remarque ses yeux vagabonds qui paraissent lire dans le vide quand il me répond : « Des maths. » Je pouffe de mon frêle souffle de gonzesse frigorifiée avant de comprendre qu’il ne plaisante pas et devine même quelques équations murmurées sur ses lèvres appliquées à la tâche. Je lui demande « Mais pourquoi ? » et m’entends répondre sans respirer : « T’as pas envie de savoir. » Il me déçoit sans partage. Je patienterais bien mais l’entendre étouffer un discret « quarante-huit… » ne m’y encourage pas. Je décide de remédier à ma propre inconfortable situation et entreprends d’éteindre la lumière pour la nuit. « Attention. » je m’entends prévenir sans vraiment savoir pour qui ni pourquoi. Dans la pénombre, le bruit des vents et de la pluie sur nos têtes me parait avoir redoublé d’effort. Je m’affaire et ratasse, un peu gauche dans l’endroit étriqué en prenant soin de ne pas bousculer la figure assise de Gigi que je ne vois plus mais devine tout près de moi. J’expire, déjà soulagée, quand mon tribut tombe, lourd et gorgé d’eau, au fond de la tente. « Qu’est-ce que tu fais ? » il finit par interroger, sûrement perturbé sur le chemin de son prix Nobel. « Je me déshabille. » je lui apprends en laissant mon short rejoindre le haut dont je me suis déjà débarrassée. J’ai toujours froid mais me sens déjà soulagée, enveloppée dans la couverture dont le contact direct sur ma peau me réchauffe un peu. « Et toi ? » je demande, ma voix paraissant faible sous la pluie battante et le ciel déchiré par le son d’un géant trainant quelque chose de lourd au plafond. « Rien. », il m’apprend, tendu, avec un inexplicable quelque chose dans la voix. On dirait qu’il s’étrangle. « Rien rien. ». Je soupire, lui aussi, et l’espace d’une seconde la communion nous revient. Ma verticalité dans le noir me donne le vertige alors j’accroche l’épaule de Gigi pour l’entrainer avec moi quand je nous allonge tous les deux sans parvenir à rester en place, toute perturbée par des vagues de frissons ayant leur volonté propre. Je serpente, agitée sous les couvertures et finis par enrouler ma jambe sur la sienne en rapprochant son buste à l’aide de mes bras. « Donne-moi ton corps, Gigi. » je dramatise en glissant ma tête sur son torse où je trouve un réconfort aussi immédiat qu’insoupçonné. « Donne-moi ta chaleur. » Je gémis malgré moi, enrobée par sa nature protectrice et son bras venu s’enrouler autour de mes épaules par instinct. Son odeur me fait resserrer ma prise et je réalise qu’elle est ma favorite depuis la nuit des temps ; j’aimerais m’y perdre, j’aimerais qu’elle soit mienne. Quand sa main presse tendrement la chair de mon bras, je me sens fondre toute entière et m’enfoncer dans la caresse, comme s’il était devenu un moule dans lequel il me fallait m’immiscer de toute urgence ; les forces de mes jambes me désertent, sûrement emportées par les ailes des papillons nouveaux nés qui s’agitent au creux de mon ventre. J’apprends alors, en la ressentant, la déchirante soif de contact humain qui éblouie tous mes sens l’espace d’une minute enivrante. Les battements de son cœur perturbé sous mon oreille m’émeuvent à surpasser la force ravageuse du temps. Je me sens mieux, ainsi réchauffée par sa douceur, sa proximité et sa folle émotion qui trouve chez moi un écho parfait, mon jumeau. Mon pied sur le sien prend un léger appui pour m’aider à grandir le long de son corps svelte. Le mouvement laisse tomber sa main sur mon flanc où une électricité soudaine me mange les côtes en réinventant mes frissons surpassés. Chaque seconde s’étire et s’allonge en donnant un nouveau baptême à ses membres. Sa peau. Ses intentions. Ses sons. Et cette odeur où j’aimerais me perdre. Que je voudrais mienne. Enfin, j’atteins son visage et ma main trouve une place qu’elle jure sienne depuis toujours, à la jonction de sa mâchoire et son oreille. « Mon Gigi. », je lui dis. « Je t’aime. ». Mes yeux caressent son visage malgré le noir et je devine tout sans mal, si bien qu’il m’est aisé de trouver le chemin de ses lèvres. J’y pose un tendre baisé accueilli par son souffle court puis réciproqué avec une affection si transparente qu’elle me donne envie de pleurer. Il m’embrasse et je trouve dans le geste un désespoir dont l’adoration m’achève. Je ne savais pas. N’avais aucune idée de l’existence de ce besoin de le sentir tout à moi. Un infime instant, je crains de mourir emportée par le tumulte de mon cœur explosé. Je me sens exhaussée, entière, transcendée, démunie à ne plus rien avoir à offrir puisque je me cède toute à lui, sans question, par plaisir. Gigi me rend chaque caresse au centuple et je le sens rougir ma peau par endroits lorsque ses mains s’y attardent. Je ne m’étais jamais sentie aussi proche d’un autre être vivant. J’ai le doute vertigineux de ne plus savoir dire où il s’arrête et où je commence. Je ressens en moi la diffusion immédiate et foudroyante d’une dépendance à sa langue, à ses doigts, sa chaleur, à ses bruits et la plus minuscule des vibrations qui forment une vive addiction dont je ne me déferai pas indemne. Ni même du tout. Je me raccroche à lui, cherchant à renforcer chaque appui, chaque contact et tous ces désirs entêtants qui sont les cathédrales de l’amour. Je le vénère, lui tout entier. Je le prie, le prends, le mords, le lèche, l’embrasse, le serre, le rends, le griffe, le presse, le touche et le garde à moi dans un psaume devenu magie en prose. Et dans l’hallelujah qui nous bénit, j’enseigne toute une religion à mon meilleur ami attentif, magnifique et généreux jusque dans mes souffles qu’il emprunte et retourne sur ma bouche. Je le découvre, autoritaire et patient. Il est doux. Quand il soupire, il chante. Il est tendre et j’apprends toutes les gammes de Gigi tandis que son cœur tambourinant contre le mien mène une danse qui ouvre les portes d’un autre monde. Et dans ce monde, j’adopte son odeur dans laquelle je me perds. Elle devient mienne.
Je me suis levée la première, n’ayant dormi qu’à peine. Je n’ai aucune idée de l’heure qu’il peut être, ni même depuis combien de temps je suis assise dans le lac, son eau glaciale nous enrobant, la couverture de Titty et moi, jusqu’à la taille. Mes cheveux sont encore mouillés de la veille mais je ne tremble que par sursauts, lorsque ma conscience refait surface. Une brèche sévère s’en est allée entailler notre bulle de tempête et tout me parait changé tandis que le jour se lève. L’eau ayant grignoté mes membres désormais engourdis a endormi cette douleur qui m’entête. J’aimerais m’en défaire. L’oublier. Ne jamais l’avoir sentie ou qu’il suffise de simplement la renier. Elle dénote, insidieuse et vilaine, avec tout le reste de mes pensées éprises de lui. Elle me rappelle, persistante et lancinante, que rien ne sera comme avant. Qu’elle m’a physiquement modifiée tandis que lui reste le même. Il est parfait, il reste beau et sera sublimé par l’instant qui m’a déchirée sans pitié. Je l’attendais, les mots de Lina, les mots de ma mère m’y avaient préparée pourtant ; mais la sentir entre nous m’a dérobée à ce moment. Je sens encore Gigi, ici, et garde en tête l’écho de sa voix prévenante. Quelque chose retourne mon estomac. Je n’ai pas envie de perdre mon Gigi et cette idée panique brûle mes paupières égarées. Je me demande si je vais être malade, si je vais évacuer malgré moi la boule qui mange ma gorge, quand j’entends des pas approcher de moi. Ma main sèche, jusque-là agrippée à la couverture serrée contre ma poitrine, vient s’assurer qu’aucune larme n’a franchi le barrage de mes cils avant que je ne tourne la tête pour accueillir mon visiteur. Je souris. Vue d’ici, sa silhouette parait ne jamais finir. Je ne parviens pas à le voir entier sans avoir à me contorsionner à en avoir mal. J’entends souffler un juron que je ne comprends pas. Puis une paire de bras puissants me soulève comme si je ne pesais rien pour m’asseoir sur la berge. Ses mains sur mes côtes me rappellent le passage des doigts de Gigi qui ont tatoué chacun de mes os à son nom. Je me recroqueville, grelotante en enlaçant mes genoux contre mon torse, avant qu’un épais duvet ne soit enroulé autour de mon corps entier. Il glisse même un de ses bonnets sur mes cheveux humides sans prêter la moindre attention à mes vaines tentatives pour l’en empêcher. J’échappe un sourire conquis lorsqu’il s’assoit à côté de moi. Le teint halé de ses jambes m’apprend que les miennes sont pales comme la mort. Il me regarde sans rien dire, son visage de héros grec accueillant tout juste l’ombre d’une barbe naissante. Ses yeux font deux fois le chemin me reliant à la tente que j’ai quittée en y laissant un baiser sur les lèvres endormies de Gigi, et qui n’est pas la tente de Lina. J’entends le grognement qu’il étouffe en laissant tomber son visage contre ses mains immenses. Il hoche la tête, vaincu, et se résigne dans un soupire avant de glisser ses doigts dans ses cheveux. « Ta mère va me tuer. » Je mords mon sourire pour ne pas rifougner.  Ses yeux dans le vide contemplent son sort pendant quelques secondes. « Sec et net. » il décide, sans appel. Je ris d’une petite voix perdue dans ma gorge, comme l’aurait fait une enfant. « Non. » je lui apprends avec douceur, quand il sonde mon visage d’un air inquiet. Je pointe la tente du menton. Une force invisible serre mon cœur endolori. « C’est Gigi. » je le rassure sans que l’effet ne prenne sur moi. C’est Gigi. Pourquoi ça suffit pas ? Pourquoi il ne l’a pas dit aussi ? Pourquoi c’était si beau avant de ne devenir que peu de choses ? Je sais, pourtant, que je n’aurais pas pu rêver mieux. Et c’est peut-être précisément ce qui m’abime. Mon visage se tord, défait, percé à jour par son indivisible attention. Bash et sa voix prennent des mesures tendres, lorsqu’il me demande « Comment tu te sens ? » et que je ne sais pas lui répondre. Ma tête lui dit « non », perdue, et je craque sans le vouloir, sans comprendre. Il m’enlace dans la seconde, avant même que ne me prenne l’idée folle de me croire seule. En plus de me sentir sensible. Endolorie, submergée, amoureuse, souillée, changée. Un peu cassée. Et mangée par une tristesse sans nom. Couchée sur son épaule, je trouve un réconfort protecteur au sein duquel je me laisse pleurer tant que mon corps en ressent le besoin. Bash pose un baiser sur ma tempe avant de reposer son menton sur mon crane et d’attendre. Et d’attendre. « Ça s’améliore vite. » il me dit au bout d’un moment. Je l’écoute intensément, les yeux fermés, réchauffée de corps et d’esprit. « Un jour, tout ça en vaudra la peine. » Je sens sa mâchoire bouger à chaque syllabe au-dessus de ma tête. « Tu n’oublieras jamais mais tu ne garderas que le meilleur et le reste… des détails. » Sa voix calme et profonde me donne l’impression qu’il ronronne. « Je te promets. » Je le crois. Sur le champ, sans y penser à deux fois. Je le crois. La gratitude qui réveille mes sens ne trouve son égale que dans mon intense et frais soulagement. Je me sens, légère, la petite protégée d’un chevalier des temps modernes. Je pourrais dormir, serrée contre son corps devenu mon rempart. Mais derrière nous le campement s’agite tandis que les autres s’éveillent. Mon très beau-père ne bouge pas pour autant, me laissant comprendre qu’il me laisse tout le temps du monde. Qu’il n’ira nulle part. Je ressens l’intense réconfort semblable à ces souvenirs au sein desquels je suis, minuscule, blottie entre mes deux parents endormis. « Merci. » je lui confie d’un souffle chargé de tous les maux dont il m’a apaisée. Je profite qu’il soit encore assis auprès de moi, atteignable, pour embrasser sa joue picotant mes lèvres. Enrobée dans trop de couvertures, je lui demande silencieusement de l’aide pour me relever et il me met sur pieds avec une facilité décourageante. « Allez. » Il intime gentiment après avoir fait passer son index sous mon menton. « Va tout raconter à ta Lina maintenant. » Je souris, bouboule sur pattes, devenue mi-femme mi-coton. « Oui. » je lui dis, aussi perspicace qu’un jeune photographe. Demi-tour vers la casa de Lina. « Faisons comme ça. ».

Le son de la pluie s’étant un long moment tu s’intensifie dans un nouveau silence. Toutes les différentes musiques produites par les impacts sur les voitures, le trottoir et la ferraille des rambardes sont tant de symphonies qui s’unissent pour charrier jusqu’à moi les mêmes émotions qui m’ont transportée cette nuit-là, dans un tourbillon de béatitude et d’espoir qui s’échoue immanquablement dans l’abysse creusée par mon cœur mis à mal. Il git dans ce gouffre causé par une érosion de maladresse, de silence et de juvéniles incompréhensions. Mais il tourne. Il tourne encore et encore en promenant tous les mots que nous ne sommes jamais dits. Il tourne et approfondit les vieillissantes douleurs et la force des regrets. Je regarde Gigi que l’alcool et la complicité ont rendu lumineux et je me dis que si mon ventre s’improvisait paysage, il serait semblable au Grand Canyon tel qu’immortalisé sur les cartes postales ; vide, creux, terrifiant. Il abriterait des histoires, des rêves et toutes ces petites frayeurs qui accumulées y dessinent de nouveaux sillons. Je lui souris tandis qu’une boule dans ma gorge m’empêche de déglutir avec confort. L’émotion me gagnant, je songe à son conseil et repousse mon verre avant qu’il me tente. Les yeux de Gigi racontent pour lui ce qu’il s’apprête à dire ainsi je décide de ne pas le laisser faire et lui coupe l’herbe sous le pied, parlant en même temps que lui en l’écoutant abandonner pour me laisser dire doucement : « Est-ce que j’étais ta première aussi ? ». Il rit, d’un humour qu’il voudrait partager avec Teddy. Il rit, aussi généreux que notre ami, et j’ai l’impression de m’être exposée en pleine ligne de mire, mon cœur gisant fragile entre nous, sur la table. Gigi s’agite, léger, quand il demande « Ça ne s’est pas vu ? » et me donne le sentiment familier d’être à nouveau trempée, malade, les deux pieds au fond du lac. Il se lève et je profite qu’il me tourne le dos, affairé dans le four dont il sort les plats fumants, pour balbutier les mots qui m’exposent. « Comment j’aurais pu le savoir ? ». Mes bras repliés contre ma poitrine protègent instinctivement un organe vulnérable. Il a été celui par qui tout a commencé, par qui j’ai tout découvert. Je n’avais ni n’aurais voulu la moindre référence. Personne à qui le comparer sinon lui, tel qu’aimé à l’intérieur de ma tête. Quelque chose, dans ma voix ou ma posture, l’interpelle lorsqu’il se retourne, un « Ooh. » compatissant donné sans vie du bout des lèvres. Il se précipite plus près de moi, déplace sa chaise du pied et s’y laisse glisser le long de mon profil. « Bien sûr que tu étais la première. Cherry ? » je sens qu’il voudrait me toucher mais n’ose pas. Il est tant de choses encore qui m’échappent. Mais pas son regard, puisqu’il se penche pour venir chercher le mien jusque là fasciné par le clair jus de tomates laissé sur ma planche à découper. L’entendre dire « C’était spécial pour moi aussi. » me libère d’un mal physique, comme logé entre mes côtes depuis sept ans. J’expire un soulagement daté de nos échanges millésimes. Il répond à mon sourire avec une expression dont la tendresse redessine les traits affectueux. J’aurais dû demander il y a longtemps. Venir le chercher et lui parler avec courage sans attendre que l’absence de Teddy ne nous vieillisse tous de mille ans. Sans avoir à franchir seule cette frontière invisible qui sature nos esprits, depuis… cette limite terrifiante, sans nom, dont nous ne discutons pas mais qui nous unis en silence dans la douleur nous rappelant la différence entre la vie avec Teddy et la survie sans lui. Je vais pour saisir la main de Gigi mais me ravise. « Ça fait du bien à entendre. » je lui confie dans un sourire reconnaissant puis lui demande : « Pourquoi est-ce que tu m’as dit ça, alors ? », enhardie par la franchise. Mon souffle devenu court semble, à ma place, remettre en question une initiative qui pourrait avoir raison de moi. Mes doigts, cachés sous la table, jouent une petite torture qui m’ancre ici présente, en s’entre-pinçant à l’aide de mes ongles. Même ma lèvre, mordue avec impatience, lui donne l’honnête tableau d’un mal-être étouffé depuis ce lendemain matin dont l’omniprésente odeur d’herbe mouillée m’est perceptible encore maintenant. « Dis quoi ? ». Gigi s’accroche pour me suivre, une légère inquiétude perceptible dans la douceur de son front. J’essaie d’ordonner mes pensées afin qu’elles ne s’égarent pas là-bas ni ne retournent dans un lit d’hôpital. Je pense à lui, figé dans l’éternelle grâce de ses dix-huit ans. A ce matin-là, où je suis allée le trouver, encouragée par Lina qui avait réduit à néant le dernier de mes naïfs affolements. À l’excitation que j’avais sentie naitre puis abreuvée à l’eau de pluie jusqu’à ce qu’elle s’épanouisse en chemin et puis meurt subitement devant le visage fermé de Gigi. « Qu’on n’aurait pas dû. » je lui apprends comme je l’entendais me l’annoncer. « Quoi ? ». Il réagit vite mais ce n’est pas ce que j’attendais. Est-ce qu’il a oublié ? Comment a-t-il pu oublier ? « Je l’ai seulement dit pour te devancer. » Il s’est redressé, sur la défensive, l’air de me demander comment je peux ne pas m’en souvenir. « Quoi ? » je m’entends lui faire écho. « Ça m’aurait tué, de te l’entendre dire. » Je ne comprends pas. « Tu allais le dire. » il annonce avec une certitude qui me blesse, d’autant plus que j’ignore d’où elle tient ses origines. « Non ! » J’aimerais que tout ralentisse. J’aimerais qu’il explique. Qu’il arrête de sourire. « Pour- » j’amorce avant qu’il ne me coupe pour dire « Tu n’étais plus là. », l’air de tanguer sur le souvenir d’un réveil sans moi. Je bouge, mal à l’aise sur mon siège soudain inconfortable. Il n’a pas compris. J’inspire pour lui dire mais il me devance et sa voix tombe comme un couperet. « Tu pleurais. ». Si cela suffisait, je lui rappellerais que je pleure tout le temps et qu’en atteste notre conversation qui, il y a encore une minute, avait tout d’une pieuse quiétude. J’aimerais le toucher mais ne supporte pas l’idée qu’il recule. Les battements de mon cœur me montent à la tête, je suis écœurée d’apprendre si tard lui avoir causé autant de mal. Son verdict m’impacte, je cherche les mots pour y faire appel. J’ai pleuré, oui. Mais comment le dire ? « Ça n’avait rien à voir avec toi. J’étais, j’avais peur que… je me suis sentie… tu vas trouver ça bête. » Le dire à voix haute me rendrait folle. « Dis-le. » Si je me tais, je le perds. « Je ne sais pas, c’était compliqué… j’ai si vite changé d’avis, Gigi. Mais j’ai craint que tu me trouves… gâchée ? » J’ai l’impression de lui avoir donné un gifle. « Jamais ! » il se défend, un peu blessé. Je le sais, maintenant. Mais « Quand tu me l’as dit – », il ne me laisse pas finir « J’ai cru que tu regrettais. ». Je souffle quelque chose de médusé. « C’est toi, qui regrettais. ». Gigi, m’apprenant alors qu’il se contenait jusqu’ici, se lève d’un bond en tapant de la paume sur la table. Son verre vide bascule sans se briser et je retiens ma respiration en suivant le fil tendu des deux secondes suivantes. Il rive une main à ses cheveux et l’autre, tendue vers moi, désigne une invisible évidence. « Tu plaisantes ? » s’anime son émotion rhétorique, mais ma tête lui répond tout de même. Non. Gigi plante son visage à hauteur du mien. Ses doigts encerclent mon visage sans le toucher. Je tremble, sans oser bouger. Il mimique mon « non » qui chez lui prend une allure stupéfaite. Il ne tient pas en place et recule lorsqu’il chante : « C’est la plus belle nuit de ma vie ! » et déraille en chemin, sa voix s’échouant sur un semblant de rire. « Oh. » Je vais pleurer. « Ne pleure pas. » Non. « Je pleure pas. » Une seule larme, c’est pas des pleurs. « Tu pleures. » Je lui refais non. Il se calme et mon ventre repeuplé prend des airs d’oasis florissante, régénérée par un miracle. J’essaie de caler mon souffle sur les battements réguliers d’un cœur imaginaire, d’une émotion paisible qui ne serait pas la mienne. Il l’a dit au présent, et je ne sais pas quoi en faire. J’ai besoin de réconfort, de la chaleur d’un ami qui me protégerait de tout, surtout du temps qui passe, en me promettant sans mensonge que tout finira par s’arranger. Alors je tends les bras à mon meilleur ami, comme le ferait un enfant qui désire être soulevé par un parent. Et Gigi, comme toujours depuis toujours, répond à la demande et m’encercle dans la seconde. J’hésite, une poussière d’instant, à résister aux pleurs qui m’aveuglent. Mais les impatients sans se préoccuper de mon cas de conscience font leur chemin sur mes joues avant de se perdre contre le torse de Gigi. Je le sers, reconnaissante et terrassée par les regrets. Je le sers aussi fort que j’ai craint de le perdre. Je le sers comme nous aurions dû le faire il y a sept ans au lieu de jouer les aguerris en pensant pouvoir combler les silences de l’autre dont l’éloquence trompeuse nous aura privés de tout. Je voudrais ne pas avoir attendu si longtemps, j’aimerais avoir eu l’audace de tout lui confier sans compliquer les instants que les gestes épurés avaient rincés de tout soupçon. Gigi, solide et debout, enlace ma tremblante silhouette assise et le passage de sa main à l’arrière de ma nuque dégagée m’apaise jusqu’à me laisser inspirer calmement son odeur devenue mon odeur et que je ne rendrai pour rien au monde. Je me promets, scellant un pacte avec mon propre amour, de ne plus laisser les inquiétudes voiler mes sentiments. Je mourrais, si cela devait m’enlever à Wade. « Je suis désolée, Gigi. » je regrette en appuyant ma déclaration d’une caresse. « Moi aussi. » il avoue sans contrainte ni suspens. J’entends presque le vent tourner pour nous la page d’un malentendu passé. Ma main, qui se promenait doucement contre son dos, survole un os là où ne devrait pas se trouver un os ; ma langue tique sur mon palais, et mes pensées entre elles se déchirent façon battle royale pour n’en garder qu’une dernière, obsédée par ma trouvaille. Je tâte, mes doigts pressant dans la chair dure de son flanc. C’est à n’y rien comprendre. « C’est nouveau ? ». Qu’est-ce qu’il est encore allé faire ? « C’est un muscle, ça ? ». Je l’entends rire juste sous mon oreille. Il me délivre gentiment de l’étreinte, en gardant ses mains sur mes épaules pour prendre des mesures de sécurité. Je passe l’une de mes mains sur mon propre corps, à la recherche de la même zone fascinante. « Parce que moi, j'l'ai pas. ». C’est ridicule. Je me lève en inspectant le long de mes autres côtes en tournant sur moi-même comme un chien qui pourchasse sa propre queue. Son rire me fait l’effet d’une drogue diffusée dans mes veines à la vitesse de l’éclair. J’essuie mon visage que je devine rougis par les émotions tandis qu’il s’éloigne et relève le verre qu’il a fait tomber avant de me dire ces choses au présent. Je me recompose, plus légère et heureuse que je ne me suis autorisée à l’être depuis des lustres. Gigi inspecte les deux plats de lasagne qu’il a confectionnés pour moi et semble décider qu’elles sont parfaites avant de me demander sans pression : « Est-ce que Wade est obèse ? ». J’éclate de rire, surprise, et mon propre rire me fait du bien. Je le sens venir de loin. Et sur son chemin, il a tout illuminé : du fond de l’éternité jusqu’au souvenir de ses propres ancêtres. Je ne sais même pas quoi répondre alors je grimace, lèvre retroussée et bras levés dans un geste d’impuissance sidérée. J’aimerais que Maddie m’envoie un « OMG WTF » au timing impeccable. « Wade. » il répète comme si le problème venait de mon ouïe irréprochable, merci bien. « J’ai un doute. Je me pose la question depuis deux heures. ». Je souris, pensant à Wade que j’aimerais sous toutes les formes, même rond à débarouler les routes plates. Mais je visualise surtout, et avec une urgence instinctive, les contours de ses bras musclés, engoncés dans ses élégantes chemises qui peinent à contenir sa perfection. Il est d’une sensualité facile, irrésistible parce que sans effort. Je ne crois même pas qu’il en ait conscience et cette sincère modestie rehausse sans cesse son charme époustouflant. S’il pouvait administrer son sourire comme médicament, il n’aurait plus aucun patient. « Pourquoi ? » Où est-ce qu’il est allé chercher une idée pareille ? Gigi désigne ses lasagnes. « Tu m’as tout fait faire en double. Et tu n’es pas exactement la plus grande mangeuse. Alors je me demande. » Je pouffe, m’imaginant nourrir un ogre à qui un seul de ces généreux plats ne suffirait pas. La chaleur des émotions, associée à celle émanant encore du four, aggravent le rouge qui me monte aux joues lorsque je pense à Wade. « Je t’ai demandé deux plats pour que tu puisses en apporter un chez toi. », je lui explique « Et en faire profiter ta sirène. », mon cœur se pince, quand je pense à Sixtine. J’aimerais tant l’aimer. Je redoublerai d’efforts pour qu’elle m’accepte, me couperai en quatre pour qu’elle m’adopte. Et j’y parviendrai, peu importe ce qu’il m’en coute. « Pour la remercier de me laisser t’emprunter. » j’explique en espérant qu’elle accepte l’offrande. Personne ne résiste à la cuisine de Gigi, aussi accoutumée que l’on y soit. Je le laisse poser une feuille d’aluminium sur chacune de ses chaudes réussites. Puis il me sourit en balayant mes idioties de la tête. « C’est pas toi, qui m’empruntes. ». Je ne suis pas sûre de le suivre. « Qu’est-ce que ça veut dire ? ». Gigi me tourne le dos en enroulant le plat qu’il emportera dans un tissu. « Ce n’est pas important. ». Je me rapproche de lui, mes émotions maintenues dans un parfait équilibre. Sereines, mais au-dessus d’un précipice. « J’ai l’impression que si. » je tente, en me rapprochant de lui. S’il me cache des muscles, me dis-je, il me cache peut-être d’autres trucs. Mais je ne le pousserai pas d’avantage ce soir, pas après l’orage dans l’orage. « J’espère qu’il les aimera. » il tranche dans un sourire qui me fend le cœur d’une entaille minuscule par laquelle s’écoule un fol espoir. « Mais – » je commence, poussée par une envie tenace de satisfaire ma curiosité. Il ne me laisse pas faire et sa voix prend le pas sur la mienne tandis que je le suis, comme aimantée à son parcours, alors qu’il saisit son manteau d’un bleu profond. Il l’enfile et dans le geste me dit « Je t’aime. ». Je fonds. « C’est pas juste. » j’assène sans l’ombre d’une rancune. « Ça me fait toujours taire. » et il le sait mieux que personne. C’est ma faiblesse, mon caillou vert. Ces mots ont sur moi pouvoir de vie et de mort. Ils tirent mes ficelles, régissent la hiérarchie de tout ce qui s’anime en mon être, ils sont mon nom véritable et confèrent à quiconque le tourne contre moi un effet incommensurable. « Je sais. » s’éclairent Gigi et ses yeux d’ambre avant de poser un au revoir tendre près de mon sourire. Je sautille, excitée par la perspective de mon avenir tel qu’il me fut promis ce soir. Tout ira bien. Quand il ouvre la porte, un vent nouveau s’engouffre chez moi ; il sent l'herbe, la pluie, la vie, la ville, le froid. Et, s’enroulant autour de Gigi, se teinte du meilleur parfum au monde. L'amour, en somme.


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